Mi Hijo
Tito Fernandez
Mon Fils
Chaque fois que je pense à mon fils
ça me fait comme une douleur,
ici, tout au fond de la poitrine,
dans cet endroit si sensible,
tellement nommé
et si enclin à l'émotion,
cette masse colorée
qu'on appelle cœur.
Et comment ne pas la ressentir
si c'est "mon" fils,
celle qui avec ses bêtises,
son chewing-gum et sa confiture,
me laissait collants
le couvre-lit, l'oreiller,
et même si parfois je voulais le gronder,
j'échouais toujours
car le petit malin sortait
avec son sourire innocent
et en le voyant, si souriant,
et... eh bien, je le pardonnais.
Comment oublier les matins
où maman le coiffait,
sentant, lui, sur une chaise
le menton levé,
dans un geste de protestation
pour la lutte qu'ils menaient
maman et le "tourbillon"
qui gagnait presque toujours.
(Et je n'ai jamais réussi à comprendre
la raison pour laquelle
on le coiffait tant et tant
si au final ça restait pareil).
Mais le temps passe
et aujourd'hui mon fils n'est plus le même,
et il ne cause plus les problèmes,
amusants, d'enfant,
maintenant c'est un "gentleman",
il se rase avec "mon" rasoir,
il fume "mes" cigarettes
et met "mes" cravates.
Fini l'innocent
des frayeurs, des pleurs et de la toux,
maintenant c'est lui qui commande
et il sait même plus que moi.
D'ailleurs, sans aller plus loin,
hier il m'a amené sa copine,
à l'intérieur, je les ai bénis,
à l'extérieur, je suis resté sérieux,
car je dois avouer
que ça m'a fait un peu peur
de voir, chez ces jeunes,
comment le temps a filé.
Aujourd'hui tout semble différent,
les vêtements, le fauteuil, l'oreiller,
s'il semble qu'il manque
"ce" petit peu de confiture,
et tout est à sa place,
il n'y a rien sur quoi trébucher,
personne pour briser un verre
ni faire fâcher maman,
Et les assiettes ne se cassent pas,
et le canari ne s'échappe pas,
comme mon fils me manque!
dans cette maison si grande.